Souvent méconnu et sous-diagnostiqué particulièrement chez la femme, le syndrome d’apnées du sommeil n’est pas sans conséquences sur la qualité de vie et sur la fonction cardiovasculaire (1). L’évolution de l’imprégnation hormonale au cours de la vie de la femme influence la prévalence et la sévérité de ce syndrome.
Certes, le syndrome d’apnées du sommeil (SAS) est moins fréquent chez la femme que chez l’homme (49% chez l’homme et 23% chez la femme) dans la population générale (2). Cependant, après la ménopause, la différence de prévalence entre homme et femme diminue nettement à la fois en raison de la chute du taux des hormones féminines et de la prise de poids souvent associée. Pendant la grossesse, on assiste également à une augmentation de la prévalence pouvant passer à 28% au cours du dernier trimestre.
La différence homme-femme s’explique d’abord sur le plan anatomique. Les femmes ont un espace aérien certes plus étroit au niveau des voies aériennes supérieures (VAS) mais qui se collabe moins et une répartition graisseuse moins importante au niveau pharyngé. Cependant lors de la grossesse, l’augmentation des oestrogènes provoque un oedème au niveau des VAS facilitant leur fermeture également favorisée par la déstabilisation des centres respiratoires liée à l’imprégnation progestéronique. Lors de la grossesse s’ajoute, surtout au cours des derniers mois, une modification de la mécanique respiratoire en rapport avec l’augmentation du volume utérin et la réduction des volumes pulmonaires sous l’effet du refoulement du diaphragme.
La symptomatologie clinique chez la femme est souvent moins typique que chez l’homme et trompeuse car peu de plaintes d’hypersomnie ou de ronflements, même si ces signes existent. Les signes d’appel sont plutôt généraux à type de fatigue, de manque d’allant, de tendance dépressive ou d’insomnie et de cauchemars. Il faut donc y penser et évoquer ce diagnostic d’autant plus s’il existe un poids excessif, un syndrome métabolique, ou une simple HTA. Le syndrome d’apnée du sommeil est souvent plus sévère chez les femmes ménopausées sans doute en raison de la prise de poids, des modifications hormonales et de la plus grande collapsibilité des VAS.
Les complications cardio-vasculaires sont fréquentes avec risques accrus d’HTA, d’AVC, d’infarctus. Les femmes à « haut risque cardiovasculaire » présentent 4 fois plus souvent un SAS modéré à sévère que les autres et doivent par conséquent bénéficier d’un dépistage systématique de SAS. Au cours de la grossesse, les troubles respiratoires du sommeil augmentent considérablement le risque d’éclampsie et de diabète gestationnel. Ils ont aussi un impact majeur sur l’approvisionnement sanguin du fœtus avec retard de croissance intra-utérine et un fort risque de prématurité.
Traiter le syndrome d’apnées du sommeil est donc indispensable compte tenu de sa morbi-mortalité notamment cardio-vasculaire et de la détérioration de la qualité de vie. Il repose à la fois sur des règles hygiéno-diététiques comprenant une perte de poids et une bonne hygiène du sommeil et sur le traitement plus spécifique des troubles respiratoires soit par Pression positive continue par voie nasale (PPC), soit par adaptation d’un orthèse d’avancée mandibulaire (OAM). Le choix de ces traitements étant guidé par à la fois la sévérité du SAS (niveau de l’index d’apnée-hypopnée) et la configuration anatomique des voies aériennes supérieures. En cas de grossesse, le traitement peut dans certains cas être transitoire, le SAS pouvant régresser suite à l’accouchement.
1- Drager LF et al. INCOSACT Initiative (international Collaboration of SLEEP Apnea Cardiovascular Trialist). Sleep apnea and cardiovascular disease: lessons from recent trial and need for team science. Circulation 2017;136 (19):1840-50
2- Heinze R et al. Prevalence of sleep-disordered breathing in the general population: the HypnoLaus study. Lancet Repir Med 2015;3(4):310-8
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